Un activateur d'égalité réelle

Masculinisation de la prévention ou prévention masculiniste ?

24/08/23 |  , ,

Masculinisation de la prévention ou prévention masculiniste ?

Une étude des campagnes de prévention des violences faites aux femmes destinées aux hommes alliés

Une étude d’ Anne-Sophie Tirmarche  publiée en mars 2023

 

« Depuis les années 2000, de plus en plus d'initiatives de prévention s'adressent aux hommes, considérés aujourd'hui comme partenaires nécessaires dans la lutte contre les violences faites aux femmes.

La plupart de ces initiatives reposent sur un essentialisme stratégique, qui vante les qualités desdits hommes.

Si ces discours flatteurs de « masculinité positive » facilitent la mobilisation des intéressés, dans quelle mesure ne constituent-ils pas aussi un terrain glissant vers une auto-célébration masculine, peu propice à une remise en question des inégalités structurelles entre les femmes et les hommes ? Comment éviter cet effet contre-productif ?(…)

SOURCE – Pour en savoir plus

 

pour télécharger l’étude, cliquez ici

 

exemple :

Certaines campagnes, telle celle du Ruban blanc menée par la Ville de Liège en 2019 (photo illustration) , ne mobilisent pas explicitement le concept de force, mais choisissent des protagonistes qui correspondent à cet idéal masculin hégémonique de la force physique (en l'occurrence, le footballeur Eden Hazard et le boxeur Ryad Merhy). Associé au slogan « Sois un homme, respecte les femmes », ce choix de représentation renforce l'idée selon laquelle un vrai homme est doté de certaines compétences physiques. Notons néanmoins qu'un spot vidéo développé dans le cadre de cette même campagne, sur lequel nous revenons ci-dessous, met en scène de jeunes sportives liégeoises qui affirment verbalement et visuellement leur force.

D'autres campagnes, comme celle du Ruban blanc menée par la Ville de Liège en 2020 ou celle de l'équipe géorgienne de rugby, ne mobilisent pas les concepts de la force et du courage, mais leur versant négatif, soit la faiblesse (à travers le slogan « La violence faite aux femmes est l'arme des faibles »  ou les propos tenus par les rugbymen, comme « La violence à l'égard des femmes, c'est de la faiblesse ») et la lâcheté (pour les joueurs de rugby, « Maltraiter une femme est lâche »). Ici aussi, le choix comme rôles modèles d'hommes musclés pratiquant un sport de contact considéré comme « viril » entretient l'idéal masculin encore répandu  de la force physique. Si ONU Femmes avait pour idée de « partager des messages critiques aux hommes et aux garçons à propos des stéréotypes » à travers non seulement le spot des rugbymen, mais aussi des interventions dans les médias et auprès de jeunes détenus dans la capitale Tbilissi, cet objectif contraste avec le choix de souligner visuellement, dans le spot, les attributs de force physique – en atteste le zoom sur le biceps à la seconde 11'' éternel emblème de la masculinité traditionnelle. Cette naturalisation de la force masculine est bien ce que retiennent certains jeunes exposés à la campagne, comme Sandro, 13 ans, qui déclare « Tous mes amis rêvent de devenir des joueurs de rugby. Ils sont forts et gentils, comme des vrais hommes, et je veux être comme eux » – ce qu'ONU Femmes considère comme le signe que « le message de masculinité positive a pris racine »

Toutefois, les slogans de ces deux campagnes élargissent indirectement la portée du concept de force à travers ces prémisses :

Les hommes violents sont lâches et faibles
Je m'oppose à ces violences
Je suis fort et courageux
On déduit donc, par syllogisme, que les hommes qui s'opposent aux violences faites aux femmes sont forts et courageux. Un leitmotiv d'ailleurs affectionné par les mouvements d'hommes alliés, selon Macomber, qui dépeignent souvent les « vrais hommes » comme « assez forts, assez courageux et assez braves pour se dresser contre le sexisme et les violences envers les femmes »

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